Lune 35 : la station service

Adus tire sur sa laisse frénétiquement, tiré par une odeur inconnue ou fuyant les coups d'Oh Dae-Su qui n'y va pas de main morte, ou vraisemblablement les deux vu qu'il change soudainement de cap.

Ha, saloperie ! Continue d'marcher droit, veux-tu ?

Un coup de taloche de plus et un de trop : Adus tire plus fort, la corde cède, il se met à courir droit devant lui. Oh Dae-Su hésite à le poursuivre, puis se rappelant qu'on a filé un arc à la chose, s'élance à sa suite.

Dégueulasserie d'mutant ! R'viens là avant qu'j'te pète les ch'villes !!!

Sur les chevilles du mutant, Oh Dae-Su bondit à travers des taillis désséchés, par dessus des fossés, des cactus et des serpents à sonnette, et escaladant un promontoire rocheux, découvre Adus, arrêté, en pleine copulation avec une vieille pompe à essence indattable...
Le vieux coréen s'avance, la main à son arc, jusqu'à la station service désaffectée, saisit une pompe non souillée par Adus, dont il presse la gachette. Vide...
Sans un mot il s'avance vers le bâtiment où jadis les enfants poussaient leurs parents exténués à leur acheter des friandises hors de prix, où les routiers versaient dans leur café de distributeur un peu de tord boyaux d'une flasque huileuse de sueur. Prêt à tout découvrir, il bondit à l'intérieur, l'arc à la main. C'est un vaste chantier qui s'offre à la vue : aucune étagère ne tient plus debout, par terre les plantes poussent parmi les squelettes broyés et les douilles de fusil, les murs en plâtre parcourus de lézardes et d'impacts de balles ont viré au jaune franc... La station a été pillée, il y a des décénnies.
Le coréen se relâche, avançant parmi les décombres maintenant que ses yeux se sont habitués à la pénombre intérieure. Dans un coin de la pièce, il avise plusieurs distributeurs : café, sans intérêt, barres chocolatées, vides, sodas, vide aussi... et un distributeur de cigarettes.

Voyons ça...

Saisissant la machine à deux mains, il la tire vers lui et c'est un pan du mur rongé de pourriture qui vient avec le vieil automate. Levant la chose en l'air, il la lance sur le sol avec force et fracas. C'est un véritable trésor qui maintenant s'ouvre à lui...

Prévenue par radio, Ariel lève le camp précipitamment, et le reste des hyènes accourt à grande vitesse. Adus est toujours occupé à se reproduire avec la pompe à essence tandis que les pillards retardataires investissent la ruine.

Putain d'bondieuserie d'bon dieux !.. On a découvert... un asile !

Tandis qu'Oh Dae-Su remplit son sac de clopes, grognant à l'encontre de la moindre main s'approchant de sa trouvaille, Ariel commence à soulever les étagères renversées. Elle enfourne dans son sac des gadgets inutiles - petites voitures Majorette, cahiers de coloriages - soudain elle se redresse, un pistolet à eau en plastique vert et orange fluos à la main.

R'gardez ! J'ai trouvé un fusil !!

Mais déjà son regard se reporte sur le sol, elle jette le pistolet par dessus son épaule et s'accroupit brutalement.

tudieu... comment on va les défoncer avec ça...

On peut alors entendre déchirer du plastique, puis on entend souffler, souffler, et souffler encore. Bientôt Ariel se redresse avec un énorme canon noir : une M-60 gonflable avec écrit "Zora"

Assis sur une dune, le vieil homme regardait ses compagnons fouiller la ruine. Quelques minutes plus tard, ils revinrent les bras chargés de bibelots divers.

Ariel, gamine, t'as les yeux qui brillent. Encore plus que d'habitude. T'as trouvé quoi de beau dans ces ruines ? Un pistolet en plastique ? Ca sert à quoi c'truc là ?

[hrp: on est tombé sur une carcasse, c'est ça ? Y avait quoi à l'interieur ?]

[en fait, pas une carcasse, plutôt sur ça
Cavey m'a filé pour rigoler un objet. Regarde dans mon inventaire.]