Ce jour là, Josep n'alla pas travailler. Pour compenser, cela faisait plusieurs jours qu'il allait travailler plus tôt, les yeux mis clos et encore engourdis par sa soirée de la veille au Fond du Trou . Il y dormait aussi d'ailleurs, le mirrador n'était guère accueillant durant l'hiver. Ainsi plutôt que d'aller rejoindre Ferinais et Michel à l'atelier, il contourna le bistrot et dégagea la neige d'un amas de chutes de planches et de palmes sèches. Quand il eu tout dégagé l'alambic de John apparu. A ses côtés la réserve de bois mort utilisée pour chauffer le bar. Aujourd'hui il allait de nouveau essayer de fabriquer un alcool potable. Les fruits devaient avoir suffisament macéré depuis que Youenn et lui les avaient préparés en attente de ce moment. Seulement voilà, le pôte Youenn il se promenait dans le désert en direction du passage depuis plusieurs lunes. C'est donc tout seul qu'il allait devoir opérer. Il commencait à fournir le foyer en combustile quand il s'arrêta. "Crétin" fit il en se frapant le front avec la paume de sa main. Il avait oublier d'amener les récipients contenant les fruits.
Ceux là même qui étaient stockés dans la salle du fond. Il retourna dans le bar et en sorti quelques temps après avec un baquet d'où émanait une odeur peu engageante. Quelques habitants qui passaient par là le regardèrent étonné, puis firent mine d'aller vers le bar.
C'est fermé, allez plutôt bosser !
Il avait presque crié et son cure dent avait failli quitter sa bouche. Il continua son chemin ignorant la réaction des autres, posa le récipient par terre et repris où il en était. Il serait grand temps d'aller chercher le reste quand celui là dystillerait. Il alluma le feu, remplis la cuve et ferma le tout, il ignorait comment John s'y était pris, mais la cuve avait l'air étanche, mis à part l'orifice de sortie de la vapeur évidemment. Pendant les heures qui suivirent, Josep essaya de garder un feu constant, heureusement le vent était faible ce jour là et le ciel était clair.
John avait récupéré un vieux tube métalique pour faire condenser la vapeur, si Josep avait bien compris comment procéder, il devrait essayer de produire un maximum d'alcool avant la fin de l'hiver. S'il faisait trop chaud, l'alcool s'en allait en fumée. Un maximum, malheureusement ca se limiterait à ce que Maxine leur avait filé à Youenn et lui avant le rationnement. Maintenant l'intégralité des stocks devrait servir à nourrir la population.
A l'autre bout du tuyau, des goutes se formaient et tombaient dans une grosse gourde, une de celles qu'il utilisait quand il était puisatier. Il jura une deuxième fois, il n'avait rien prévu pour son repas de midi et il ne pouvait pas abandonner le feu. Il ne lui restait plus qu'à espérer que quelqu'un passe par là. Autant espérer voir Maxine manger de la viande, personne ne passait jamais par là. Tant pis. Il repris sa besogne en espérant cette fois produire un bon cru. Il le saurait bientôt.