Contact avec Arkham.

S'éloignant du feu, un soir, Ariel s'enfonce dans les bois sans lampe, juste avec sa bouteille de décoction de champignons qui bientôt devrait être laissée derrière. Seule, elle trifouille sa radio jusqu'à capter la fréquence qu'elle veut :

Le contact s'établit péniblement avec une autre fréquence. Entre les parasites, tu peux entendre des propos fragmentaires, des gloussements, des larsens et autres joyeusetés. Au bout d'un moment de ce manège, une voix que tu as peut-être déjà entendue sur les longues ondes mais ne t'étant jusque là jamais destinée, une voix, donc, délurée de jeune femme, prend la parole.

AH ! Ben c'est pas trop tôt ! Putain, ces vieux machins, c'est plus c'que c'était. Arkham ? Faisons les choses dans les règles. Après tout c'est pas parce que je me maquille pas comme tout le monde qu'il faut pas rester poli, hein.
Mais au fait, à qui je parle ? Et puis c'est qui le chef au juste, chez vous ? C'est qu'j'arrive pas à suivre, moi, avec toutes ces villes qui bourgeonnent de partoutn et ces putschs et ces coups d'états et ces renversements d'pouvoir pour un oui, pour un non, on en croirait presque que les gens n'respectent pu rien ! Genre ! Bref. Moi chuis Ariel Tombale, plus ou moins chef de Tombstone N'empêche que nous non plus on fait pas très simple dans le genre... C'est vrai, quoi, merde à la fin ! C'est pas simple la polismique !
Bon, bref, de quoi que j'parlais déjà ? Passe-moi un adulte, petit, tu veux ? Au fait, vous fumez le cigare, vous les docteurs ?

Hmm ? Quoi ? Qu'est-ce que c'est que ce peit papier ? Hum ?? Ha oui ! *hrem*

"Bonjour, mademoiselle Red Lily. Je suis un de vos plus grands admirateurs et..." putain, qui est-ce qui m'a écrit ce discours de merde ? C'est toi ? Nan mais c'est pas vrai de qui on s'entoure, d'nos jure, j'vous jours !
Mademoiselle Lily la Rouge, j'aime pas bien procéder comme ça, mais y m'faut un pétit bilan d'la situation polysismique, pasque si j'ai bien suivi, vous êtes presque nos voisins, et en fait on s'est juste *jamais* contactés pour décider un peu comment on allait procéder par la suite. A c'que j'ai compris, vot' ville s'est faite attaquer par New Saigon ? Mais c'est quoi c'bordel ! Fallait v'nir nous en parler, on aurait fait quelque chose !
Bref, moi chuis d'un naturel liant, mais faut pas trop m'chercher. J'vous passerai plus l'courrier d'fans, par contre j'veux pas vous voir débarquer à l'improviste devant ma tente toutes dents dehors pour nous attaquer. On est des gens civilisés, et quand on tue quelque chose, on le prépare aux petits oignons si c'était un d'nos proches ! et c'est pas vot' chef cuistot qui me contredira...

Alors hein, quoi ? Comment on fait, bordel à nouille ? Tombstone est une ville ouverte d'esprit, et on vend des armes. Vous, vous êtes plutôt dans le trip "impérialiste", "sectaire", "anarcho-communistes" ou vous vous préoccupez pas trop d'ce genre de conneries, comme nous ?

(Je poste ici la réponse de Red Lily, parce que je trouve l'échange assez savoureux et qu'il est, à mon avis, annonciateur de bonnes choses)



La jeune femme qui répond d'une voix chaude a un ton direct, ainsi que des intonations franches.

Ariel Tombale, ça me parle oui, je crois que j'ai du entendre ta voix à la radio. Si je ne me trompe pas, tu habites sur l'oasis qu'il y a vers le sud est de chez nous, mais de là à dire que nous sommes voisins...

J'ai pas vraiment compris ce que tu voulais me dire dans ton message, si ce n'est que tu as des armes à vendre et que tu nous prends pour des impérialistes sectaires anarchistes communistes juif franc maçons. Moi tu sais la sociologie et les grands mots je n'y comprends rien.

En tous cas ça me fait plaisir que tu aies pensé à nous pour écouler ta marchandise, mais je doute qu'on ait vraiment de quoi vous payer. Vous proposez quoi comme came?

Ah ! Putain ! Ouf ! J'ai cru qu'j'allais tomber sur un groupe de fanatiques religieux de plus. Tu parles ma langue, babe, c'est cool : on va s'entendre.

V'la, tu vois, pour qu'tu comprennes un peu c'que j'te d'mande, faut qu'j'te pose le dessin d'qui chuis, ou j'vais, l'étagère et tout. Moi, tu vois, j'ai pas l'air comme ça, mais j'ai d'la bouteille, ouais. J'ai connu l'monde d'Avant, avant la météorite et les cerbères de feu, et les tentacules de néant qui sortent du sol et tout, et t'sais quoi ? C'était genre pas très bien ma tasse de thé. J'te dresse le tableau : si tu f'sais pas caca là où on t'disait, une balle dans la nuque. Si tu f'sais pas pipi là où on t'disait, une balle dans la gueule. Si tu prenais pas tes cachetons à l'heure qu'on t'disait, une balle dans l'bide. Et si tu laissais pas les matons d'remuer la merde dans l'cul avec leur matraque, alors t'avais droit au trois. Super, hein ? Tout ça organisé d'une main de fer par quelques connards cocaïnomanes planqués dans leur tour d'ivoire sur un fleuve de merde, j'pourrais même te dire les noms mais ça t'parelerait pas, enfin bref. Même que mon homme il a voulu lancer un p'tit commerce honnête, et qu'ses associés s'sont faits buter pasque la main d'oeuvre était pas couverte par une mutuelle. N'importe quoi.
Donc moi dans ce p'tit monde joyeux, j'allais, tu vois, et j'faisais mon p'tit bonhomme de chien, et là, d'un coup, boum, bam, bim, les types en blanc, les camisoles, branle bas de combat et tout.

(La voix change un peu et vire au chevrottement, presque au sanglot)
Et ça, alors ! Ca, putain, mais alors ça, plus jamais ! Ha non ! Plus jamais ! Merde !
Alors quand j'apprends qu'un campement de connards se plante à côté d'une ville avec laquelle j'essaie de construire une région où on peut vivre sa petite vie innocente et gentille et qui fait d'mal à personne, putain ! Mais alors là, j'te jure ! Quand j'apprends qu'une bande de trous du culs s'entasse derrière des barricades et commencent à fabriquer des armes et donne à leur bouge infect le nom d'un asile d'aliénés, putain ! Chais pas pourquoi mais j'me sens comme qui dirait m'nacée !
Tu peux comprendre, ça, hein ? Tu peux comprendre ?!

Alors voilà, la question elle est simple, ma caille. J'veux savoir pourquoi vous m'nacez Luudion, et j'veux savoir si vous avez l'intention d'venir nous emmerder dans notre désert où y a rien d'bien joyeux à visiter à part un trou d'verdure où coule une rivière et où on essaie de vivre à l'abri du monde des trous du cul nauséabonds avec leurs camisoles et leurs grosses seringues et leurs matraques et leurs visites nocturnes !
En un mot comme en sang, j'veux qu'tu m'dises, Red Lily, si votre camp au nom d'fort mauvais goût, j'dois y voir une menace à ma tranquilité et à ma paix intérieure, BORDEL DE MERDE !!!

La voix de la jeune femme n’a pas changé de ton.

Dis moi, tu m’as l’air bien énervée là. Visiblement ça te fait du bien de parler à quelqu’un alors surtout ne te gène pas, laisse sortir les choses, ça ira mieux après. Tant que tu commences pas à me raconter des trucs sur ta mère qui buvait et ton père qui te violait, ça me dérange pas.

Ensuite, plusieurs choses.
Déjà on n’est pas voisin. A vu de nez, mes plans me disent qu’on doit être à une petite saison en courant les uns des autres.
Ensuite, j’ai un peu écouté vos ondes publiques et il me semble que la vie paisible que vous comptez mener et bien elle ne l’est pas pour tout le monde. Je me souviens avoir été contacté il y a quelques semaines par un gars de chez vous qui voulait monter un groupe de pillards violents et sanguinaires…j’entends encore les bouches de l’enfer et autres joyeusetés qui parsèment vos ondes. Donc sur le côté on est sympas et on cherche un coin tranquille où on fera pas chier nos voisins (ou assimilés comme tels), je reste assez dubitatif.

Je crois que tu m’as proposée des armes à la vente, que vous fabriquiez. Mais ça doit sûrement être fait pour chasser le lièvre sauvage.

Donc, juste pour mettre tout ça au point.
Tu ne nous traites pas de trous du cul, ou de connards, ça sera déjà un progrès.
Pour le nom de notre rade, je suis navrée si ça te rappelle des mauvais souvenirs, mais il s’avère qu’il s’appelait comme ça quand on est arrivé et qu’on a pas pris le temps de changer le nom…mais ça va peut être arriver.

Pour le reste, je suis sûre qu’on pourra s’entendre comme cul et chemise.


Hum..tant que j'y suis ma caille, si tu veux discuter aussi avec mes poteaux, on peut t'ouvrir une petite fréquence privée où on pourrait parler bizness et chiffon.
Parce que moi tu sais, ces histoires de paix et d'amour et de région et de voisinage, ça me pationne pas plus que ça...
Donc si tu veux qu'on éclaircisse un peu tout ça, libre à toi.

Ariel Tombale a écrit:

Je me souviens avoir été contacté il y a quelques semaines par un gars de chez vous qui voulait monter un groupe de pillards violents et sanguinaires…

Ha tiens, elle parle d'moi la gamine, j'crois. A l'époque elle m'avait répondu qu'elle cherchait du boulot et qu'si on payait bien elle était prêt à étriper qui on voulait. Maint'nant qu'elle est à la tête d'une communauté, elle se la sent plus péter la p'tite.

Hin hin, petite pute. J'vais les mettre à ma botte ces connards, tu vas voir, et quand on va débarquer et qu'y nous croiront potes, on va bien les niquer ma parole...

Ariel reprend le micro :

Et voilà ! Tu vois ? J'en étais sûre. Quoi qu'on fasse, quoi qu'on dise, on en r'vien toujours à c'te putain d'étiquette du hippie à grandes oreilles qui te vante les mérites de la chasse, de la pêche, la nature et les traditions, et puis la ganja et le droit de vote, pasqu'il aime beaucoup les petits chats, le gentil hippie, et sous prétexte qu'il veut vivre tranquille et heureux et que moi aussi, alors chuis un hippie. Putain mais nan, quoi ! Merde !

Alors voilà où on en est, c'est nul. En face, au Nord et au Nord-Est, y a des queutards assoiffés qui nous prennent pour des fous, pasque le fou, bien sûr, il est toujours minoritaire, t'as pas r'marqué ? Et toi, pleine de bonnes intentions mais visiblement pas beaucoup plus réfléchie qu'un pois chiche tu viens m'dire que tu crois pas qu'chuis une gentille petite Heidi, et putain, c'est vrai ! Mais du coup tu supputes que si on fait des armes et que c'est pas pour chasser des lièvres, alors c'est forcément pour faire des grandes batailles où à la fin j'ai gagné et chuis la seule sur terre tellement tout l'monde est mort ! Merde ! Prends-moi pour une conne tant qu't'y es !

Nan, figure-toi, machine, qu'avec Tombstone je réalise un rêve, et mieux qu'ça : un rêve d'avenir, d'un monde où les gens oublient enfin la putain de norme débile qui veut qu'l'humain soit plus épanoui dans un costume trois pièces à raconter des blagues à la machine à café pour draguer les filles de la compta. Et c'rêve, ouais, chuis prète à m'battre pour le défendre, pour que des déglingés d'la tête tout mignons et tout propres viennent pas m'le foutre en l'air.
La Zone Australe, c'est MON monde, et dans mon monde, l'homme et la hyène s'entendent super bien.

Alors ouais, branche-moi avec tes potes, mais annonce-leur la couleur : Ariel Tombale elle déteindra pas au lavage, pasqu'on lui lavera pas les neurones.

S'en suit une longue conversation avec les membres plus ou moins importants d'Arkham, pour laquelle Ariel s'isole. Au bout d'un moment il semble y avoir une pause ; elle revient vers vous.

Ha putain, c'pas vrai, tous ces connards jouent double, ou même triple, ou enfin bref, quoi, ils essaient de faire de la stratagésie... truc, là... des maths !

'sont tous pareil. Vivement qu'on ait des gros fusils, qu'on arrête de s'prendre la tête...

J'peux v'nir voir ? Promis, j'f'rais des efforts pour me tenir.

C'est sur leur fréquence à eux, inscris-toi.

Bien, mais ne fous faites pas avoir pour autant (ce dont je doute), ces personnes tournent pour Lune de Miel...
Espérons que votre opération soit un succès, que l'on n'en parle plus... :/